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Les manquements coupables de l’État dans l’aggravation de la vie chère en Outre-mer, et singulièrement en Guadeloupe



Ne nous y trompons pas : même si pour l’instant la société civile guadeloupéenne demeure peu mobilisée pour dénoncer « l’invivabilité » du système outre-mer français, elle suit avec une grande attention, notamment au travers des réseaux sociaux, la mobilisation contre la vie chère portée par le RPPRAC (Rassemblement pour la protection des peuples et ressources afro-caribéens) en Martinique depuis juillet dernier.

 

Il faut dire que nombre de compatriotes et d’organisations syndicales et politiques qui s’étaient fortement impliqués dans le grand mouvement de 2009 contre la « pwofitasyon », sont aujourd’hui totalement dépités, constatant que quinze ans plus tard, le coût de la vie est devenu exorbitant, et en particulier pour l’alimentation. En effet, selon l’INSEE, en 2022, les écarts de prix pour les produits alimentaires sont de +42% entre la Guadeloupe et la France hexagonale, alors même que le niveau de vie médian est très inférieur à celui de l’Hexagone. De plus, toujours selon l’INSEE, en 2017, le taux de pauvreté monétaire dans les DOM (départements d’outre-mer), est deux à cinq fois plus élevé que dans l’Hexagone. 

 

Par ailleurs, le RPPRAC a su créer une forte adhésion populaire à son projet de lutte contre la vie chère à partir d’une utilisation massive des réseaux sociaux, et en se positionnant comme l’incarnation de la souffrance du peuple. Toutefois, force est d’admettre que cette association soutient une idéologie ethno-raciale porteuse d’exclusions et lourde de dangers pour le vivreensemble, au sein de nos sociétés multiraciales et métissées. Plus troublant, le leader de cette organisation, Rodrigue Petitot, n’a pas hésité à s’afficher publiquement aux côtés du représentant local du Rassemblement national, lors d’un déplacement récent en Guadeloupe. Il y a donc lieu de s’interroger sur la nature populiste de ce mouvement.

 

Il n’empêche que par leur détermination, mais aussi la force de leur conviction pour porter au grand jour toute l’opacité qui règne autour des prix et des marges des oligopoles de l’import-distribution, les leaders du RPPRAC ont réussi de manière tout à fait imprévisible à faire inscrire sur les agendas politiques la lutte contre ce système économique inique, hérité d’un long passé colonial qui tarde à se clore, et dont l’ensemble des peuples d’Outre-mer ne veulent plus.

 

Nous devons donc regarder bien au-delà des contradictions internes et de la radicalité parfois excessive du RPPRAC – radicalité des modes d’action qui à terme ne peut que nuire à l’aboutissement des revendications portées –, pour nous concentrer sur l’essentiel au travers de cette simple question : Comment se peut-il que quinze ans après le LKP (Lyannaj Kont Pwofitasyon), la cherté de la vie, adossée à un taux de pauvreté très préoccupant, atteint des niveaux désormais quasi-insoutenables pour de nombreux compatriotes ultramarins ? Et dans ce cas, à qui incombe la responsabilité d’une telle situation ? l’État ? les responsables politiques ? les acteurs socioéconomiques ? nos concitoyens eux-mêmes ?

 

Sans aucun doute, les responsabilités sont partagées, mais nous le disons d’emblée : l’État, ne seraitce que par ses prérogatives de puissance publique et garant de l’intérêt général, détient une responsabilité première dans l’aggravation du coût de la vie en Outre-mer ! Pire, à bien des égards l’État est défaillant, et les responsables politiques nationaux en place depuis bientôt dix ans – comment justifier que 7 ministres des Outre-mer se soient succédé en 7 ans ? – ont fait preuve, soit d’indifférence impardonnable à l’égard des Outre-mer, soit d’une crasse méconnaissance des spécificités de nos territoires, soit de complicité passive, voire de complaisance étonnante avec les puissants oligopoles de l’import-distribution et du transport maritime !

 

Bien entendu, les propos avancés ici s’appuient sur des faits suffisamment étayés, au travers de plusieurs reportages ou enquêtes journalistiques, ainsi que de nombreux rapports et études sur la problématique de la cherté de la vie en Outre-mer. On peut ainsi citer les avis de l’Autorité de la concurrence (de 2009 et de 2019), le rapport d’étude réalisé par l'Observatoire des prix, des marges et des revenus (OPMR) de La Réunion en 2019, l’étude du Conseil économique, social et environnemental (CESE) d’octobre 2020, et surtout le rapport parlementaire du 20 juillet 2023, dit « rapport Hajjar », du nom de l’ancien député martiniquais Johnny Hajjar ; document essentiel que nul ultramarin ne devrait désormais ignorer.

 

Trop d’études, de rapports et d’alertes ont été produits depuis plus de 10 ans, pour que les responsables politiques nationaux de premier plan feignent d’ignorer la situation des Outre-mer. D’autant que nombre de préconisations concrètes et pertinentes ont été formulées par les différentes instances précitées, et qui ne semblent pas avoir été mises en œuvre, ou en tout cas pas dans des proportions suffisantes, et à même d’infléchir significativement le coût de la vie dans nos territoires. Pourtant, le président de la République lui-même semblait avoir pris toute la mesure de la gravité de la situation, puisqu’il déclarait lors d’un déplacement à La Réunion en 2019 : « si la vie est chère c’est parce qu’on n’a pas suffisamment développé la production locale et parce qu’il y en a quelques-uns, en quelque sorte, qui ont tout pris pour eux, ne nous mentons pas. Et donc qu’il s’agisse des transports, des BTP, l’agro-alimentaire ou la distribution je veux que nous redoublions d’efforts pour lutter contre ce fléau ». Cinq ans après les déclarations fracassantes d’Emmanuel Macron, le constat de l’inaction des pouvoirs publics est très amer pour l’ensemble des ultramarins !

 

Il aura malheureusement fallu attendre la mobilisation du RPPRAC et des échauffourées en Martinique pour qu’enfin il y ait un début d’intervention de l’État, au travers notamment de la signature du « protocole d’objectifs et de moyens de lutte contre la vie chère » intervenue le 16 octobre dernier, mais que ni les représentants du RPPRAC ni le président des OPMR Antilles-Guyane n’ont signé. Les principaux signataires sont le préfet, le président de la CTM (collectivité territoriale de Martinique), les parlementaires, et les représentants de la distribution de gros et de détail. Or, la faiblesse et la grande fragilité de cet « accord », tient au fait qu’aucune mesure contraignante n’est imposée aux oligopoles de l’import-distribution, tandis que l’essentiel de l’effort financier repose sur l’Etat (suppression de la TVA sur 54 familles de produits de grande consommation correspondant à près de 6 000 produits) et la CTM (baisse significative de la taxe d’octroi de mer sur ces mêmes familles de produits). En outre, cet accord est provisoire et circonscrivant uniquement les produits alimentaires, ne touche que partiellement le système des prix. Quelles garanties avons-nous en effet, que les distributeurs répercuteront la baisse induite des taxes sur les prix, et qu’ils appliqueront au mieux un gel de leurs taux de marge ? Quel crédit et quelle confiance leur accorder quand l’on sait que la plus grande opacité règne sur les marges et le fonctionnement de ces grands groupes depuis tantôt, et que leurs dirigeants n’hésitent pas à déclarer devant la représentation nationale, sous serment, qu’ils ne respectent pas l’obligation en droit de publier annuellement leurs comptes de société, sous prétexte de violation du « sacro-saint » secret des affaires ? Il est vrai que les sanctions en pareil cas sont loin d’être dissuasives !

 

En outre, le préambule du protocole d’objectifs et de moyens du 16 octobre indique que « 67% du différentiel des prix entre l’hexagone et la Martinique sont imputés aux frais d’approche », alors même que l’Autorité de la concurrence, dans son avis rendu en 2019 semble formelle : « Les frais d’approche représentent 16% du coût total moyen d’un distributeur ». En réalité – et la plupart des experts s’accordent sur ce point –, les frais d’approche apparaissent comme secondaires dans la détermination du prix final pour le consommateur, et n’expliquent en aucun cas un tel différentiel de prix des produits de grande consommation (PCG) entre la France hexagonale et les Outre-mer. Tout porte à établir que les grands groupes de l’import-distribution appliquent, dans la plus grande opacité, des taux de marges nettement supérieurs à ceux observés dans l’Hexagone, voire même des marges exorbitantes sur certains produits. En effet, toujours selon l’Autorité de la concurrence (dans un avis rendu en 2009), « les marges prélevées par les importateurs-grossistes apparaissent en effet relativement élevées. Elles oscillent de 20 à 60 % sur un grand nombre de références, et peuvent approcher ou dépasser 100 % pour certaines références » (sic !)

 

Et nous, citoyens des Outre-mer, sommes en quelque sorte captifs de ces comportements économiques de domination – pour ne pas dire de prédation –, où quelques grands groupes se partagent l’essentiel du marché de l’import-distribution, dans un environnement oligopolistique par définition même très peu concurrentiel, fortement préjudiciable à des niveaux de prix décents. D’autant que ces entreprises, et tout particulièrement les groupes GBH et SAFO, pratiquent à la fois la concentration horizontale (ils occupent des parts significatives de marché aussi bien dans l’alimentation que dans l’automobile, les pièces détachées, le bricolage, et même le sport), et l’intégration verticale (ils sont omniprésents sur toute la chaîne d’approvisionnement des produits, au départ de l’usine et jusqu’à la vente en magasin, au travers des centrales d’achat, des activités de transitaire, mais aussi de logisticiens). Ainsi, chaque groupe dispose d’une entité pour chacun de ces secteurs, mais une entité-mère coiffe l’ensemble de ces sous-entités. Or, chaque sousentité applique au passage une marge pour son activité. Et c’est bien cette accumulation des marges des différents intervenants de la chaîne qui explique de tels écarts de prix. Mais au final, toutes ces marges finissent toujours dans les poches des mêmes bénéficiaires, actionnaires de ces holdings et ce, au détriment une fois de plus de la population et singulièrement, des plus fragiles.

 

Ainsi, à la lecture des nombreux rapports, études et avis sur le sujet, il nous apparaît évident que ces grandes entreprises oligopolistiques, parce qu’elles exercent leurs activités dans la plus grande opacité, ont des pratiques qui bloquent le pluralisme concurrentiel, certaines plus que probablement illégales, et qui ne peuvent qu’aboutir au renchérissement des marges et donc des prix en Outremer. Parmi ces pratiques, citons pêle-mêle celles très répandues des marges arrière (qui demeurent néanmoins légales), correspondant à des accords passés entre distributeurs et fournisseurs, par lesquels les fournisseurs consentent à des remises de fin d’année aux distributeurs si les objectifs de vente sont atteints (ce qui est pratiquement toujours le cas), mais qui ne profitent jamais aux consommateurs. Mais de telles pratiques ont notamment pour effet « de fragiliser les producteurs locaux et de déstabiliser les commerçants de proximité » (selon le rapport du CESE d’octobre 2020). Autres pratiques répandues par ces grands groupes : du fait de l’intégration verticale, ils disposent en amont de la chaîne d’approvisionnement de centrales d’achat prépondérantes, qui influencent fortement les prix du marché, et qui peuvent les conduire à accorder des avantages tarifaires à leurs propres enseignes, au détriment de celles de leurs concurrents. Enfin, depuis la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer, dite « loi Lurel » du nom de l’ancien ministre des Outre-mer Victorin Lurel, les accords d’exclusivité entre des marques ou des enseignes nationales et les distributeurs locaux sont interdits (article L. 420-2-1 du code de commerce), mais de l’aveu même de l’Autorité de la concurrence, ces accords d’exclusivité perdurent dans les faits. Au point que des distributeurs concurrents évoquent de nombreux exemples où des fournisseurs en Hexagone refusent de leur livrer directement le produit, ou de leur accorder des tarifs préférentiels.

 

A la lumière des faits, les manquements de l’État pour faire respecter ne serait-ce que le droit, et le droit de la concurrence en particulier, sont tout autant flagrants que consternants ! D’autant que la « loi Lurel », qui a introduit dans le code de commerce un nombre significatif d’articles spécifiques aux pays ultramarins, ainsi que la loi relative à « l’égalité réelle outre-mer » de 2017, permettent au Gouvernement, aux préfets, à l’Autorité de la concurrence et aux DGCCRF (directions générales de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) de prendre des initiatives et d’exercer de larges prérogatives, à la fois incitatives et coercitives. Serait-ce de la pusillanimité de la part de ces élites politiques et administratives face à ces grands lobbys influents ? Ou alors de la fascination pour les puissances de l’argent, et de la complaisance à leur égard ?

 

Il est « minuit moins une seconde » à l’horloge des Outre-mer, et il n’est plus l’heure d’un énième rapport, d’une énième enquête, ou des grand-messes telles que des énièmes états généraux des Outre-mer. Le diagnostic est parfaitement connu, et les causes structurelles de « l’invivabilité » de nos territoires aussi. Il est maintenant plus qu’urgent d’agir, par tout un ensemble de mesures et de politiques publiques globales, cohérentes et efficientes. Et d’ores et déjà, avec une ferme détermination qui se veut à la fois éloignée d’un appel au secours comme de l’attente d’une bonne nouvelle, nous demandons : 

§  Que les hauts fonctionnaires de Bercy et de l’Autorité de la concurrence agissant dans le cadre de leurs prérogatives, et disposant d’informations essentielles comme par exemple les taux de marges des grands lobbys du fret et de l’import-distribution, cessent la rétention d’information sous prétexte de violer le secret des affaires (certes renforcé par la loi du 30 juillet 2018). Parce que, la loi prévoit clairement des exceptions à la protection du secret des affaires, et en particulier dans le cas où il s’agirait de « révéler, dans le but de protéger l'intérêt général et de bonne foi, une activité illégale, une faute ou un comportement répréhensible, y compris lors de l'exercice du droit d'alerte » ;

 

§  Que l’Autorité de la concurrence use enfin de son pouvoir « d’injonction structurelle » jusqu’alors jamais utilisé, tel que prévu par l’article L. 752-27 du code de commerce, spécifique aux Outre-mer. Cela afin de contraindre les entreprises ou groupes d’entreprises exerçant une position dominante, de « modifier, de compléter ou de résilier, dans un délai déterminé qui ne peut excéder six mois, tous accords et tous actes par lesquels s’est constituée la puissance économique qui permet les prix ou les marges élevés constatés » ;

 

§  Que les moyens humains et budgétaires de l’Autorité de la concurrence soient renforcés, et de « créer en son sein une équipe dédiée spécifiquement et exclusivement à l’Outre-mer et dotée de moyens spécifiques » (rapport Hajjar du 20 juillet 2023) ;

 

§  Que les moyens humains et budgétaires des OPMR (observatoires des prix, des marges et des revenus) soient considérablement renforcés pour l’ensemble des Outre-mer. De faire en sorte que les OPMR des Antilles-Guyane cessent d’être des coquilles vides, et jouent enfin pleinement leur rôle, à l’instar des nombreuses initiatives prises par l’OPMR de La Réunion (les OPMR, tout comme les collectivités locales ultramarines, ont la faculté de saisir directement l’Autorité de la concurrence, mais ils n’ont jamais usé de telles prérogatives, à part l’OPMR de La Réunion). Il est notamment anormal qu’un seul magistrat nommé par la Cour des comptes exerce la présidence, à la fois des OPMR de Guadeloupe, de Martinique, et de Guyane. Un-e président-e par territoire nous paraîtrait beaucoup plus cohérent. En outre, dans le but de renforcer le pouvoir d’initiative et de contrôle des simples citoyens, les OPMR des Antilles-Guyane pourraient s’inspirer de l’expérimentation menée à La Réunion, qui permet à 50 Réunionnais tirés au sort de participer aux travaux de l’OPMR. Nous soutenons fermement cette pratique citoyenne ;

 

§  Que les préfets utilisent toutes leurs prérogatives découlant de l’article L. 410-5 du code de commerce, dans le cadre de la mise en œuvre du « bouclier qualité prix » (BQP). D’autant que le BQP concentre de nombreuses critiques, parmi lesquelles son manque de lisibilité et une publicité très insuffisante – sinon défaillante –, dans les magasins. L’État devrait davantage impliquer les transporteurs, les centrales d’achat et les grossistes-importateurs lors des négociations sur le BQP, et pas uniquement les distributeurs, et en outre systématiquement y associer les OPMR. Il dispose de surcroît d’un pouvoir unilatéral pour arrêter les prix des produits concernés, en l’absence d’accord ;

 

§  Que dans le cadre de la continuité territoriale, l’État institue une aide au fret significative et pérenne, afin de baisser le coût d’importation des produits par voie maritime, plutôt que de s’en remettre au bon vouloir du groupe CMA-CGM, en situation de quasi-monopole pour le fret en Outre-mer. En effet, le PDG du groupe, Rodolphe Saadé – qui ne cache pas sa proximité avec Emmanuel Macron –, a consenti depuis août 2022 à la mise en place d’une aide au pouvoir d’achat, à hauteur de 750 euros par conteneur de 40 pieds, mais n’offre aucune garantie quant à la pérennité d’un tel dispositif. D’autant que CMA-CGM fait preuve de très peu de transparence relative au BAF (facteurs d'ajustement des soutes des navires), et que le groupe a dégagé un bénéfice net record de 23,4 milliards d’euros en 2022, grâce notamment aux acteurs économiques et aux consommateurs ultramarins. Comment par ailleurs justifier que l’État consacre chaque année 200 millions d’euros au titre de la continuité territoriale (aides pour le transport aérien et maritime) pour la Corse et ses 360 000 habitants, et seulement 45 millions d’euros pour l’ensemble des Outre-mer avec plus 2,6 millions d’habitants ? Un rééquilibrage s’avère à nos yeux absolument indispensable, nécessitant plus de 300 millions d’euros pour la continuité territoriale des Outre-mer ;

 

§  Que le POSEI (programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité) soit réformé de fond en comble. Ce programme constitue l’une des principales aides européennes à l’agriculture en Outre-mer, mais en bénéficient essentiellement, les grands lobbys de la canne et de la banane, au détriment des petites exploitations et de la diversification agricoles (il s’agit ni plus ni moins que d’une économie de rente pour ces quelques grandes exploitations). La patience et la science de nos peuples sauront ensuite agir pour que tout soit mis en œuvre au sein des différents échelons institutionnels (européen, national et local), pour nous permettre de tendre progressivement vers l’autonomie alimentaire. Il faut en outre que les acteurs politiques et économiques s’entendent sur la question du foncier agricole disponible, et que des marchés d’intérêt régionaux soient créés. Une diversité de la production agricole en fruits et légumes s’avère essentielle, de même qu’une augmentation réellement significative de la production de viande caprine, ovine et bovine. De plus, une restructuration de la pêche favorable à la pêche hauturière semble dans le même temps vitale, afin de diminuer les importations des produits issus de la pêche et de l’aquaculture. Ces importations représentent 70% de nos besoins, soit 7 500 tonnes sur 11 000 tonnes consommées chaque année ;

 

§  Que les exécutifs locaux utilisent avec plus de transparence et d’efficacité l’octroi de mer, afin de protéger et d’encourager les productions locales. Une réforme de cet impôt local – instrument fiscal et financier de premier plan en vue de l’approfondissement de l’autonomie politique et institutionnelle de nos territoires –, s’avérera à terme nécessaire, notamment pour diminuer le nombre de taux, et simplifier les dispositifs d’exonération, en les rendant plus transparents et lisibles. La question de l’extension de l’octroi de mer au secteur des services, tout en allégeant son poids sur celui de l’import-distribution, mérite d’être étudiée dans le cadre de cette réforme à venir ;

 

§  De maintenir la « surrémunération » des fonctionnaires en Outre-mer. Car une telle suppression engendrerait une perte conséquente de pouvoir d’achat pour nombre d’agents publics, en particulier les plus modestes, et surtout créerait une sévère dépression économique dans nos territoires, et donc encore plus de chômage et de précarité. Néanmoins, comment remédier à cette injustice criante entre les salariés du public et nombre de salariés du privé ? Nous proposons qu’une expérimentation puisse être mise en œuvre, afin de revaloriser les bas salaires du secteur privé d’au moins 20%, et que l’État puisse en contrepartie aider les petites et moyennes entreprises à financer cette revalorisation salariale. Une expérimentation sur la mise en place d’un « revenu universel » pour les publics en difficulté d’insertion sociale et professionnelle, en particulier les jeunes, pourrait en outre être étudiée ;

 

§  Que nos peuples s’emparent des outils permettant des expérimentations de démocraties participatives, en s’inspirant notamment des propositions formulées par le collectif « Guadeloupe Ethique et Démocratie » : https://www.collectifged.com/post/pour-unerefondation-de-la-d%C3%A9mocratie-locale-en-guadeloupe ;

 

Enfin, au vu de la gravité structurelle de la situation socioéconomique des territoires ultramarins, nous exhortons le Gouvernement et le Parlement à mettre définitivement un terme à cette « discrimination structurelle » qui frappe nos pays depuis le Pacte colonial. Il nous paraît inconcevable et inacceptable que dans le cadre des débats en cours à l’Assemblée nationale sur le projet de loi de finances 2025, il soit proposé une diminution de plus de 350 millions d’euros des crédits dédiés aux Outre-mer, alors même que nous ne sommes en rien responsables du dérapage des déficits publics ! Fort de leur potentiel de développement important, il est plus que temps de nouer avec ces anciennes colonies un nouveau pacte réellement républicain, en vue d’élaborer un schéma de développement économique concerté, négocié mieux pensé et maîtrisé dans un cadre constitutionnel rénové. Cela implique une synergie constructive entre tous les acteurs : les collectivités territoriales, l’État et la société civile. Cette condition est absolument indispensable à un développement mieux pensé par nous-mêmes, et en dehors d’une logique économique où seul le Profit compte.

 

Les signataires :

Tony ALBINA, enseignant, Alex BANDOU, chef d’exploitation agricole, Annick BANGOU, ancienne cadre de direction de la fonction publique, Jenner BEDMINSTER, professeur de philosophie, David BOUCAUD, économiste et psychanalyste, Marcel BRIDE, architecte, Mirette CALME, cadre hospitalier, Ketty CELESTE, enseignante retraitée, Harry CLOTAIRE, enseignant, David DAHOMAY, cadre territorial, Jacky DAHOMAY, philosophe, Isabelle DANIGO, enseignante, Sonia DERIAU-REINE, plasticienne, exprofesseur, Didier DESTOUCHES, politologue et essayiste, Emilienne DORLIPO, administrative fonction publique hospitalière, Tania FOUCAN, médecin, Georges FORIER, cadre commercial retraité, Karine GATIBELZA, cheffe d’entreprise, Greg GERMAIN, acteur, Johnny GITANY, syndicaliste et cadre territorial,

Patrick GUEPPOID, agent de maîtrise aérien et musicien, Mikaël GUSTAVE, psychologue clinicien, Béatrice IBENE, vétérinaire, Hubert JABOT, avocat, Victor JEAN-NOEL, consultant en développement nautique, Claude KIAVUÉ, militant culturel, Guy LAFAGES, auteur dramaturge, Jean-Yves LETANG, retraité, Guy LUBETH, enseignant retraité, Sohad MAGEN, enseignante, Guy MANETTE, cadre de banque retraité, Viviane MELYON-DEFRANCE, médecin, Jocelyn MENARD, musicien, Georges MERAULT, universitaire retraité, Rosan MONZA, cadre territorial et musicien, Jane MORTON, avocate, Serge NIRELEP, chef d’entreprise, Errol NUISSIER, psychologue, Thierry OTTO, conseiller-formateur, Clara PALMISTE, enseignante-chercheuse, Hubert PARIZE, directeur d’école, Simone PAULIN, artiste, Patrick PERGENT, enseignant, Bernard PHIPPS, enseignant retraité, Jean-Claude PIERROT, médecin, Pascale POIRVILLE, enseignante, Michel REINETTE, journaliste, Pierre REINETTE, ancien haut fonctionnaire, Laurence ROMANA, universitaire, Christian SAAD, universitaire, Philippe SADIKALAY, enseignant et musicien, Willy SALZEDO, musicien, Joseph SÉNÉ, ancien cadre de société d’assurance, Laurence SIOBUD, citoyenne engagée, Martine SORNAY, enseignante retraitée, Willy VAINQUEUR, photographe, Dominique VELLEYEN, fonctionnaire territoriale.



 

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